La justice néo-zélandaise estime que la plateforme américaine de transport ne pouvait échapper à ses responsabilités d’employeur envers les travailleurs assurant son activité, selon une décision rendue récemment.
Pour la Cour suprême de Nouvelle-Zélande, les chauffeurs Uber doivent être considérés comme des salariés. Dans un arrêt rendu le 17 novembre dernier, la plus haute juridiction du pays a définitivement tranché la question, rejetant à l’unanimité le recours introduit par le géant américain du transport à la demande.
Celui-ci contestait une décision rendue en 2022 par le Tribunal de l’emploi, qui avait déjà déterminé que quatre chauffeurs de l’entreprise devaient être traités comme des employés de l’entreprise et non comme de simples prestataires indépendants utilisant une application.
Dans sa défense, Uber niait employer directement des chauffeurs pour assurer les trajets, affirmant n’être qu’un intermédiaire technologique facilitant la mise en relation entre conducteurs et passagers, lesquels établiraient ensuite leurs propres relations commerciales.
Le groupe soutenait par ailleurs qu’il n’exerçait aucun pouvoir hiérarchique sur les conducteurs, rappelant que ceux-ci fixent librement leurs horaires, utilisent d’autres applications concurrentes et gèrent leur activité comme des entrepreneurs autonomes.
Un contrôle effectif des chauffeurs
La Cour a cependant écarté ces arguments, mettant en avant la réalité du fonctionnement de la plateforme. Les juges ont estimé que l’organisation du travail, la supervision exercée et le manque d’autonomie réelle des chauffeurs démontrent un lien de subordination caractéristique d’une relation d’emploi.
Ils ont relevé qu’un passager, en sollicitant une course, ne s’attend pas raisonnablement à contracter avec un chauffeur indépendant, mais bien avec Uber. Cette observation fait voler en éclats la confusion entretenue par l’entreprise entre indépendance affichée et dépendance économique.
Selon la Cour, le niveau de contrôle et de direction imposé par Uber correspond à la définition d’un rapport de travail au sens de l’article 6 de la Employment Relations Act 2000.
Des droits renforcés pour les conducteurs
Cette reconnaissance ouvre la voie à de nouveaux droits pour les 11 000 chauffeurs concernés en Nouvelle-Zélande, qui pourront désormais prétendre au salaire minimum, à des horaires encadrés, aux pauses légales, aux congés payés, parentaux, pour deuil ou violences domestiques, ainsi qu’à la possibilité de contester un licenciement abusif.
Les syndicats à l’origine du recours saluent une « victoire historique » qu’ils présentent comme un point d’appui pour des milliers d’autres chauffeurs et livreurs membres de leurs organisations.
Le syndicat Workers First Union évoque la perspective de réclamer des arriérés de salaires et d’indemnités pour « sous‑paiement historique », et annonce vouloir s’engager rapidement dans une négociation collective avec Uber au nom de ses adhérents.
Pour Uber, la décision constitue un revers majeur. Sa directrice générale locale, Emma Foley, a estimé que le jugement remet en cause de nombreux accords contractuels à travers le pays. Elle rappelle que le travail indépendant demeure, selon elle, un pilier essentiel de l’économie néo-zélandaise.
