L’industrie du célèbre matériau de construction amorce une décarbonation timide, mais nécessaire face au fléau climatique.
Depuis le 19e siècle, la fabrication du ciment – celui dit de type Portland, plus couramment utilisé – fondé essentiellement sur le broyage et la cuisson du calvaire, n’a pas varié. Avec hélas, les mêmes répercussions largement documentées sur le climat.
À savoir, une forte émission (8% du total mondial) de dioxyde de carbone due notamment à la forte température – au-delà des 1500°C – nécessaire pour transformer le calvaire en cette pâte grise à l’origine du béton armé, la deuxième matière la plus utilisée dans le monde après l’eau.
Il s’agit d’un tableau pas du tout viable à long terme, au regard des défis de plus en plus importants posés par le changement climatique. D’autant que le besoin en ciment n’est pas près de s’estomper de sitôt avec l’urbanisation galopante à travers le monde, notamment dans les pays émergents.
Après tout, sans ce matériau, il n’y aurait peut-être ni routes, ni ponts, ni bâtiments d’aucune sorte nulle part. Cela soulève la problématique de la décarbonation de cette industrie, qui en tant que pays, aurait été le troisième plus grand pollueur de la planète derrière la Chine et les États, selon le Washington Post.
Une transition à bas bruit
À cet effet, de nouvelles idées émergent, notamment en Angleterre. Dans ce pays à l’origine de la Révolution industrielle, une start-up nommée fort opportunément Material Evolution tente de sortir du statu quo de la fabrication polluante du ciment. Elle promet, à en croire un reportage du Post sur le sujet, un ciment à 85% moins émetteur de CO2 que d’habitude.
Le procédé, développé initialement dans un garage pendant le confinement par Elizabeth Gilligan, une scientifique de 32 ans, repose sur un mélange intelligent de scories pulvérisées et d’additifs chimiques courants, activés non par la chaleur, mais par la friction dans des mélangeurs industriels.
« Il faudra du temps… »
« Il y a des millions de tonnes de scories qui attendent d’être exploitées à travers le monde« , explique au Washington Post, David Hughes, directeur scientifique de l’entreprise, qui promet une réduction d’une gigatonne de CO2 à l’horizon 2040, grâce à sa méthode novatrice.
Il y a cependant plus d’un défi à affronter avant de pouvoir y parvenir. Le coût des nouveaux ciments verts de Material Evolution étant estimé à environ 25% plus cher que le matériau classique. Par ailleurs, il convient de demander si l’industrie du ciment est-elle prête pour cette transformation.
« Il faudra du temps avant qu’on utilise notre ciment pour construire un pont ou un gratte-ciel« , reconnaît d’ailleurs David Hughes, avant d’ajouter toujours au Post : « Mais nous devons commencer maintenant pour y arriver« .