Congé menstruel : les entreprises s’engagent de plus en plus

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Alors que le Sénat se montre réticent face au congé menstruel, plusieurs entreprises françaises ont décidé de le proposer à leurs salariées. Parmi elles, l’éditeur de logiciels Goodays et le créateur de mobilier Louis design.

Pour de nombreuses femmes, les périodes menstruelles peuvent être très handicapantes dans leur carrière professionnelle. Car à l’origine de crampes terribles, de maux de tête et de douleurs abdominales. Sensibles à cette situation, les parlementaires espagnols ont adopté, en février 2023, un texte de loi instaurant un congé menstruel en cas de souffrances incapacitantes. L’Espagne était ainsi devenue le premier pays européen à prendre une telle mesure.

Une série de propositions de loi en France

Inspiré par leurs collègues ibériques, des députés français (socialistes et écologistes) ont déposé sur la table de l’hémicycle trois propositions de loi sur le sujet. Ils ont jugé l’initiative d’autant urgente que près de la moitié des femmes françaises souffrent de dysménorrhée et 20% ont des règles très douloureuses. Pourtant, un rapport sénatorial de la délégation aux Droits des femmes, rendu public en juin dernier, se prononce contre l’instauration d’un congé menstruel pour les salariées.

Le Sénat rejette l’application de ce dispositif

Pour ces pathologies, estiment les rapporteures de la délégation, la réponse doit être une prise en charge thérapeutique plutôt qu’un congé menstruel. Il existe toutefois une exception pour les personnes souffrant de douleurs menstruelles vraiment handicapantes et attestées par un médecin. Mais ces femmes-là devront poser un arrêt maladie sans prise en charge spécifique. Aussi, elles ne bénéficient pas de jour de carence. C’est-à-dire qu’elles s’exposent à une perte de salaire pendant cette période.

L’éditeur de logiciels Goodays en pionnier

Malgré une opposition politique, de plus en plus d’entreprises font le pari de proposer des congés menstruels à leurs salariées. C’est le cas du développeur de logiciels Goodays (ex Critizr). L’éditeur informatique trouve inconcevable, à notre époque, de contraindre les femmes à passer une journée entière au travail, avec les douleurs menstruelles et tous les effets secondaires associés. C’est pourquoi, il accorde deux jours d’arrêt maladie par mois aux salariées confrontées à ces souffrances. De plus, il n’impose aucun délai de carence, donc ne retire aucun salaire. En outre, l’entreprise autorise une flexibilité sur le télétravail.

Le pari de la confiance face aux risques d’abus

Pour ce qui concerne le risque d’abus induits par les congés menstruels, Goodays a choisi de faire confiance à ses collaboratrices. Dans cadre, la société ne demande aucun justificatif aux employées concernées. Et celles-ci lui rendraient bien sa confiance. En effet, l’éditeur de logiciels dit avoir enregistré un recours limité au dispositif depuis sa mise en place. Seulement 10% des salariées ont demandé un congé menstruel, alors que les femmes représentent 40% de son effectif de 100 salariés. Par ailleurs, ces collaboratrices ne prendraient pas de congé tous les mois et n’épuiseraient pas les deux jours de congés automatiquement.

Le créateur de mobilier Louis design se lance

Une autre entreprise pionnière, Louis design, a préféré déployer un système d’anticipation des absences. En effet, elle propose aux femmes souffrant de douleurs menstruelles de noter les jours de leurs règles afin de savoir quand elles ne pourront pas travailler. Comme Goodays, le créateur de mobilier fait fi des potentiels abus car misant sur la confiance. Notons qu’il n’y a pas que le privé qui s’engage en faveur de ce dispositif. Dans le public aussi on note, le congé menstruel fait son chemin. La municipalité de Saint-Ouen (Seine-Saint-Denis), par exemple, a décidé d’accorder un congé spécial aux femmes pendant leur période menstruelle.

Le congé menstruel, une fausse bonne idée ?

En dépit de ces efforts salutaires, on craintque le dispositif ne fasse plus de mal que de bien. Des élus, en particulier, dénoncent une « fausse bonne idée » qui risque de stigmatiser davantage les femmes. Alors qu’on prône partout l’égalité des sexes, certains hommes pourraient être confortés dans leur idée que les femmes sont plus fragiles. D’autres, en revanche, pourraient se sentir lésés de ne pas bénéficier de tel privilège. Ce qui risque d’installer une mauvaise ambiance au travail. Par ailleurs, des employeurs seraient tentés de recruter moins de femmes, aggravant ainsi la discrimination à l’embauche.


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