France : la CEDH libère les femmes du devoir conjugal

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Pour la Cour européenne des droits de l’homme, « tout acte sexuel non consenti est constitutif d’une forme de violence sexuelle », qu’importe si le cadre concerne le mariage.

Une femme mariée pourrait-elle refuser des relations sexuelles à son époux ? La réponse, sans équivoque, est oui selon la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH). L’institution judiciaire communautaire en a décidé ainsi, le 23 janvier dernier, dans le cadre d’un nouvel arrêt.

« Le devoir conjugal est contraire à la liberté sexuelle et au droit de disposer de son corps. Tout acte sexuel non consenti est constitutif d’une forme de violence sexuelle », tranche la juridiction en réponse à une requête introduite en 2021.

À l’origine, une épouse désormais âgée de 69 ans dont le divorce demandé en 2012, avait été prononcé à son tort exclusif. En cause, la cessation de sa part de toute relation intime avec son mari dès 2004, dans un contexte marqué par des violences conjugales et des problèmes de santé significatifs.

« Une violation grave et renouvelée des devoirs et obligations du mariage rendant intolérable le maintien de la vie commune », d’après un arrêt du 7 novembre 2019 rendu par la cour d’appel de Versailles sur le sujet.

La fin de siècles de domination masculine ?

Déboutée par toutes les instances françaises, la plaignante s’est alors tournée vers la CEDH, dont les sept sages ont statué à l’unanimité dans le cadre d’une décision qui va bien au-delà du cas d’espèce.

Ils ont ainsi non seulement condamné la conception française du ‘devoir conjugal’ – une notion qui ne figure même pas explicitement dans le code civil mais qui continue d’influencer la jurisprudence dans de nombreux cas de divorces –, mais aussi rejeté catégoriquement l’idée selon laquelle le consentement au mariage emporterait un consentement aux relations sexuelles futures.

« La cour ne saurait admettre, comme le suggère le gouvernement, que le consentement au mariage emporte un consentement aux relations sexuelles futures. Une telle justification serait de nature à ôter au viol conjugal son caractère répréhensible », poursuit la CEDH.

Une réforme du droit français en perspective

Cette dernière affirmation représente un caillou jeté dans le jardin de la France, dont la cour a par ailleurs dénoncé « vision archaïque du mariage ». De quoi ouvrir la voie à une adaptation prochaine du droit français.

Le ministre de la Justice, Gérald Darmanin, a d’ailleurs rapidement réagi en annonçant que la France adaptera son droit pour se conformer à cette décision saluée par les associations féministes, au premier rang desquelles le Collectif féministe contre le viol et la Fondation des femmes.

Pour l’avocate Delphine Zoughebi citée par Le Monde, cette décision va s’imposer aux juges français qui ne pourront plus considérer qu’une communauté de vie implique nécessairement une « communauté de lit ».


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